Si vous avez tenté de prendre rendez-vous via des plateformes comme Doctolib, vous avez probablement rencontré des messages habituels : "seulement pour les patients déjà suivis" ou "aucune disponibilité en ligne". Parfois, un créneau se libère mais avec des dates de rendez-vous s'étirant jusqu'à 2026.
La réalité est que les dermatologues sont devenus une ressource rare et, dans certaines zones rurales, leur absence totale est alarmante. La gravité de la situation a conduit des dermatologues à lancer une pétition auprès de l'Assemblée nationale, soulignant l’urgence d’une intervention.
"Obtenir un rendez-vous chez un dermatologue en France en 2025 est devenu un véritable parcours du combattant. Cette situation résulte d’une pénurie sans précédent de dermatologues, alors même que les maladies de peau — notamment les cancers cutanés — sont en forte augmentation", affirment les auteurs de la pétition.
D'après l'atlas de la démographie médicale, au 1er janvier 2025, seulement 2.880 dermatologues exercent en France. Ce chiffre marque une baisse de 28 % par rapport à 2010. Dans les départements comme l'Ain ou l'Eure, la situation est critique : seulement un dermatologue pour 100.000 habitants et parfois aucun, comme dans l'Indre ou la Lozère.
La défection des spécialistes se fait également sentir dans les hôpitaux, où le nombre de dermatologues a chuté de moitié en 15 ans. Ce déficit de praticiens est accentué par le vieillissement de la population médicale, 50 % des dermatologues étant âgés de plus de 60 ans, tandis que seulement 113 nouveaux praticiens sortent des facultés chaque année, selon le syndicat national des dermatologues-vénérologues (SNDV).
Cette crise d'effectifs découle en partie de l'ancienne politique du numerus clausus, qui limitait le nombre d'étudiants en médecine et qui a laissé des séquelles durables. Bien que ce système ait été abrogé en 2020, les effets se ressentent encore aujourd'hui, car la formation d'un dermatologue prend une décennie.
Paradoxalement, la spécialité attire de nombreux étudiants, mais la création de postes d'internat est encore très limitée. Pour 2025-2026, seulement 102 postes ont été ouverts, alors que la Société française de dermatologie espérait au moins 125 pour stabiliser la démographie de la spécialité.
Des experts soulignent que la faible rémunération joue également un rôle crucial. En 2023, le revenu moyen d’un dermatologue libéral était de 103.751 euros, bien en dessous de la moyenne de 121.320 euros pour toutes les spécialités médicales, faisant de la dermatologie l’une des spécialités les moins bien rémunérées.
Cette problématique se renforce encore plus par le manque de revalorisation des tarifs de consultation : seules des augmentations marginales ont été accordées lors des récentes négociations avec l'Assurance maladie, laissant de nombreux praticiens désabusés. Pour freiner cette dynamique, des solutions commencent à voir le jour, comme la télé-dermatologie qui permet d'obtenir des avis à distance, offrant ainsi une alternative aux consultations en face-à-face, notamment dans les régions sous-médicalisées.
Face à cette crise, il devient urgent de repenser les priorités en matière de formation et de rémunération afin d'assurer un accès équitable aux soins dermatologiques et de répondre correctement aux besoins croissants de la population.







